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« Pour la prochaine campagne, [à l’automne 2024], je vais sortir une partie de ma surface aujourd’hui certifiée en bio pour la cultiver en conventionnel. Pour le blé dur, c’est sûr, et la question se pose aussi pour le blé meunier », témoigne Pierrick Horel, à la tête d’une exploitation en polyculture-élevage répartie entre la Saône-et-Loire et les Alpes-de-Haute-Provence. Pour le tout nouveau président des Jeunes Agriculteurs, qui s’est installé en agriculture biologique en 2010, la décision de cette déconversion partielle est difficile, d’autant que « [sa] mère avait gardé ces terres en bio pour qu’[il crée son] exploitation ». Mais, souligne-t-il, « il lui faut préserver la performance économique » de sa ferme.
Après plus de deux années de crise, qui ont profondément secoué la filière bio française, le mouvement de déconversion s’enclenche. Les agriculteurs qui avaient fait le choix d’une agriculture respectueuse de l’environnement sans engrais ni pesticides de synthèse sont contraints de faire des choix douloureux. Parfois, ils tentent de limiter le retrait, en optant pour une déconversion partielle.
Les chiffres publiés jeudi 13 juin par l’Agence Bio démontrent l’ampleur du choc. Pour la première fois, en 2023, la surface agricole utile cultivée en bio recule dans l’Hexagone. « Nous avons perdu 54 000 hectares en un an, et [elle] est passée de 10,50 % à 10,36 % de la surface agricole totale », souligne Laure Verdeau, directrice de l’Agence Bio, une structure publique chargée de l’animation de l’écosystème du bio. La crainte de ce retrait exprimée il y a un an, alors que ce taux stagnait, pour la première fois, en 2022, s’est concrétisée.
En parallèle, le nombre de conversions a continué à reculer, alors que le mouvement de déconversion s’est poursuivi. Résultat, en 2023, le solde est encore resté positif, avec un accroissement de 2 % du nombre d’agriculteurs certifiés en bio, qui atteint désormais 61 163. « On a perdu des producteurs de grande culture, mais on a gagné des maraîchers », précise Mme Verdeau. Toutefois, la tendance pourrait se détériorer encore en 2024.
Ce coup de frein brutal s’explique par un retournement de la consommation depuis deux ans. Entre une baisse du nombre de références dans les rayons des supermarchés, une confusion des labels aux yeux des consommateurs et l’impact de l’inflation sur le pouvoir d’achat des ménages – obligés d’arbitrer dans leurs dépenses –, l’appétit des Français pour les produits estampillés de la feuille blanche sur fond vert s’est réduit. En 2023, selon l’Agence Bio, les dépenses des consommateurs sont quasi stables en valeur, à près de 12 milliards d’euros. Néanmoins, ce montant englobe l’effet de l’inflation des prix. En volume, la tendance est toujours à la baisse. D’ailleurs, la part du bio dans l’alimentation des Français, qui était de 6,4 % en 2021, puis de 6 % un an plus tard, est passée à 5,6 %.
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